Article réalisé par Théo Hetsch, France Bleu Armorique – Samedi 20 mai 2017 à 14:53 – Lien vers l’article ICI
Depuis le mois dernier, l’ambroisie est interdite en France. Elle est considérée comme « une menace à la santé humaine ». Cette plante invasive colonise désormais la Bretagne et pose un vrai problème de santé publique : d’ici 2050, elle pourrait être la principale cause d’allergies.
Olivier Audras vient trois fois par an sur ce terrain de la métropole rennaise pour y arracher des plants d’ambroisie. « Elle repousse à chaque fois, c’est très compliqué de l’éradiquer », explique ce responsable de la Fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles (Fredon) en Bretagne. « L’an dernier, des gravillons ont été mis sur ce terrain », dit-il en montrant le sol sous nos pieds, « ça a l’air de fonctionner ». Malgré tout, il vérifie dans tous les coins la présence éventuelle de pousses d’ambroisie. « Il y a trois ans, il y avait une centaine de plants ici, aujourd’hui je les cherche à la loupe », dit-il en souriant, « mais il va falloir revenir pendant dix ans pour surveiller, c’est la durée de vie de la graine ».
Cette plante exotique se propage depuis une vingtaine d’années en France, notamment en raison du changement climatique. _ »Les quatre départements bretons sont concernés »_, déplore Olivier Audras, « l’ambroisie s’est développée depuis le Sud, en suivant la vallée de la Loire et elle est aujourd’hui très présente à nos portes, dans les Pays de la Loire ». La région Rhône-Alpes est la plus touchée. La Bretagne aussi devient un terrain favorable : il y a 32 foyers d’ambroisie identifiés et surveillés dans la région. « Mais il y en a encore d’autres qu’on n’a pas encore découverts, puisqu’on relève des pollens d’ambroisie sur cinq sites en Bretagne », prévient Olivier Audras.
Le nombre de personnes allergiques à l’ambroisie devrait doubler d’ici 2050
L’ambroisie pose de vrais problèmes de santé publique. Un décret publié le 28 avril 2017 classe désormais la plante comme « une menace à la santé humaine ». L’importation et la vente sont interdites en France, sous peine de 375 euros d’amende. « Le pollen de ces plantes entraîne des symptômes allergiques sévères (rhinite, conjonctivite, eczéma, urticaire…) et peut provoquer l’apparition ou l’aggravation de l’asthme », rappelle le décret. Le pollen de l’ambroisie est effectivement très puissant : « il suffit de cinq grains de pollen par mètre cube d’air pour provoquer une réaction », confirme Olivier Audras. Le potentiel allergisant (la capacité à provoquer une réaction allergique) de l’ambroisie est de 5 sur une échelle de… 5 !
Dans quelques années, elle pourrait même devenir la principale cause d’allergies respiratoires. Selon une étude du CNRS, « les concentrations dans l’air du pollen d’ambroisie […] pourraient avoir quadruplé en Europe à l’horizon 2050 ». L’allergène du siècle en quelque sorte. Selon une autre étude, le nombre de personnes allergiques à l’ambroisie (aujourd’hui 33 millions en Europe) devrait plus que doubler d’ici 2050 pour atteindre 77 millions de personnes, soit près de 11% des européens ! « On estime les coûts médicamenteux liés au seul pollen d’ambroisie à 15 millions d’euros par an », explique Olivier Auras, « c’est en constante augmentation ».
« Des lanceurs d’alerte sur tout le territoire »
Depuis huit ans, la Fredon travaille avec l’Agence Régionale de Santé pour éradiquer la plante. « On est en train de former des responsables dans chaque communauté de communes », raconte Bénédicte Malabeuf, chargée du dispositif, « pour qu’il y ait partout des gens capables de reconnaître l’ambroisie et de nous la signaler ». C’est d’ailleurs là que le bât blesse : « l’ambroisie est une plante très quelconque, elle passe inaperçue », explique-t-elle, « avec une feuille très découpée, un port dressé et une intensité de vert assez forte ». Il y a cependant une astuce : si le recto et le verso de la feuille ont la même couleur, la même intensité de vert, il y a des chances que ce soit de l’ambroisie.
« Tous les particuliers doivent maintenant prêter attention à l’ambroisie », explique Olivier Audras. Pour cela, il conseille de commencer à chercher… autour des nichoirs à oiseaux. « Les paquets de graines contiennent régulièrement des graines d’ambroisie, mélangées à celles de tournesol », explique Olivier Audras, « c’est pourquoi la plupart des nouveaux foyers d’ambroisie en Bretagne sont détectés aux pieds des nichoirs à oiseaux ».
Si vous pensez avoir détecté un plant d’ambroisie, vous pouvez le signaler à Olivier Audras à l’adresse suivante : olivier.audras@fredon-bretagne.com
La Bretagne devient un terrain favorable pour l’ambroisie : le reportage de Théo Hetsch